Il n’y a rien d’ostentatoire dans le travail de Charles Zana, et de fait, une certaine retenue domine. Depuis 30 ans, l’architecte AD100 crée des intérieurs où chaque détail exprime élégance, fluidité et confort. Il applique une attitude similaire à son propre appartement situé au cœur de Saint-Germain-des-Prés, le quartier parisien qui est son préféré depuis son adolescence. Zana a jeté son dévolu sur cette pure expression d’un appartement Louis XVI : « J’aime ces appartements aristocratiques qui ont une vraie histoire. Ce que j’admire aussi, ce sont les proportions des pièces, les enfilades, les hauts plafonds, les grandes fenêtres, la précision des moulures et des corniches. Ce n’est pas la pompe bourgeoise du XIXe siècle ; c’est le XVIIIe qui a été le grand siècle quand il s’agit de jeter les bases du grand décor français.
Parfois, des espaces modifiés peuvent encore donner l’impression d’être là depuis toujours, l’idée opératoire étant de les fondre subtilement, tout en respectant, un décor existant. « Je crois que beaucoup d’architectes aiment vivre dans des espaces chargés d’histoire qui les précèdent et les dépassent un peu. » Ici, la préférence a été d’opter pour un look monochrome avec des rideaux et des murs blancs pour accomplir une forme de sérénité. C’est une page blanche qui invite les touches de couleur. « Je trouve que les céramiques très colorées de Sottsass s’intègrent assez bien dans cette ambiance. Issu d’une famille de collectionneurs, Zana a hérité d’un fort penchant pour le design vintage et pour créer des associations audacieuses. Esthète complet, il sait raconter l’histoire des objets et les mettre en scène dans un espace.
Le design italien radical et les maestros Ettore Sottsass, Carlo Scarpa, Andrea Branzi, Alessandro Mendini et Carlo Mollino, occupent une place de choix dans cet appartement parisien ; des positions qui évoluent constamment car l’architecte aime essayer de nouvelles combinaisons et repousser les limites, sans jamais laisser l’espace se sentir figé. « Je trouve intéressant de mélanger des objets et de raconter une histoire. J’ai peu envie de m’enfermer dans un style ou dans une époque. J’ai lancé ma carrière dans les années 1980 où le « total look » dominait. Aujourd’hui, cependant, j’aime vivre dans des espaces qui sont un mélange de sophistiqué et de bohème.
A tous les objets vintage, Zana ajoute un certain nombre d’œuvres d’art contemporain, ainsi que plusieurs meubles de sa collection Ithaca qu’il a lancée il y a un peu plus d’un an, dont le grand lit posé en diagonale sur sa chambre. Inspiré par les formes emmaillotées de Les chaises Ours polaire de Jean Royère, il s’intègre parfaitement aux boiseries en chêne qui n’ont été révélées que par hasard lorsque les murs ont été décapés pour être repeints et leur passé caché a émergé. C’est un passé qui aujourd’hui se mêle harmonieusement au présent et insuffle une atmosphère légère et intemporelle à cet ensemble à l’éclectisme mesuré.
.